Elissalde « réaliste »

mercredi 28 février 2007
par  Stango
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Privé de terrains depuis six semaines en raison d’une blessure aux côtes avec Toulouse contre l’Ulster, Jean-Baptiste Elissalde évolue dans l’ombre à Marcoussis, cantonné au travail physique pendant que Pierre Mignoni brille à "son" poste. Le demi de mêlée toulousain aura enfin l’occasion samedi de tâter le ballon avec les Barbarians, contre l’Argentine à Biarritz. Serein mais réaliste, il sait que rien n’est acquis, et a hâte de montrer enfin ce qu’il vaut.

« Jean-Baptiste, comment vous sentez-vous après cinq semaines d’efforts et de préparation physique, loin des terrains ? Je ne sais pas, c’est difficile à estimer. Je sors d’un test de cardio, et apparemment il est excellent. Mais ça ne reste que des tapis, des électrodes... Quand il va falloir jouer avec 20 centimètres de boue sortir des ballons difficiles, plaquer un mec, perdre de l’influx sur l’arbitre parce qu’il nous embrouille, s’accrocher avec son vis-à-vis, ce ne sera pas la même chose. Je suis performant en test. Maintenant le serais-je sur le terrain ? C’est ça l’important. Et j’ai l’impression d’être en forme, on verra ce week-end.

Samedi, vous retrouvez le terrain avec les Barbarians contre l’Argentine. N’est-ce pas un piège ? Non, même si tout le monde est conscient qu’avec cinq semaines de préparation dans les jambes, les batteries sont bien entamées, et qu’il sera difficile de préparer un match en quatre jours. Et les Argentins font partie des très bonnes équipes mondiales. Je ne suis pas trop inquiet sur la mise en place tactique et stratégique, je suis plus inquiet sur le rythme ou sur l’approche mentale. Il ne faut surtout pas que l’un d’entre nous joue sa carte personnelle, par exemple je ne vais pas me foutre sur la gueule avec Lionel Beauxis en lui disant « c’est moi qui botte, je veux être sélectionné ». Ce n’est pas le sujet, et je pense que ça ne se passera pas comme ça, parce qu’on a passé 5 semaines ensemble dans une bonne ambiance, et il faut que ça dure. On s’en sortira en équipe, et pas individuellement. Et puis le résultat en lui-même n’est pas primordial, on joue un test, on est pas en compétition. Les Argentins ont failli nous battre en novembre, ils nous avaient battu lors des quatre confrontations précédentes, ils sont en pleine bourre parce qu’eux sont en tournée depuis trois ou quatre semaines. Ce n’est pas facile, mais bon tant mieux ; je préfère jouer un match comme ça que de jouer contre une sélection du Haut Poitou et leur passer 80 points.

Comment vous vivez cette séparation en deux groupes, entre ceux qui jouent et les autres. Ce n’est pas difficile à vivre ? Je vais répondre en mon nom, mais sincèrement non. Pour moi, les données étaient claires. Je suis arrivé blessé, donc sûr de ne pas jouer, je m’étais fait à l’idée que je n’allais pas être sélectionné. Maintenant c’est vrai qu’il peut y avoir un peu de jalousie, mais en ce qui me concerne, tout va bien. Je me prépare et j’ai fait de ces sept semaines du bonus pour être encore mieux préparé et encore meilleur pour la fin de saison.

Vous pensez pouvoir jouer un des deux derniers matches, contre l’Angleterre ou en Ecosse ? Je suis optimiste mais aussi très réaliste. Si on ne m’appelle pas, je considérerai ça comme normal, parce que avec six semaines sans matches de haut niveau (ndlr : depuis l’Ulster le 21 janvier), c’est dur de prétendre à l’équipe de France, d’autant que les prestations de Pierre Mignoni, de l’équipe ont été bonnes. Je ne suis ni en attente, ni complètement résigné. Je positive en me disant que le boulot fait ici sera forcément bénéfique. Et si on me met aujourd’hui dans l’équipe, je sais où aller. Mais vu la dynamique du groupe, c’est compliqué de changer les mecs, même si l’encadrement avait dit qu’il ferait tourner. Enlever à tel ou tel joueur la possibilité de faire un Grand Chelem juste pour faire un roulement, c’est dur quand même.

Le Coupe du monde, vous y êtes déjà ? On est carrément dedans. Moi j’y pense sans arrêt parce qu’on s’entraîne pour ça, parce que je vois Pierre Mignoni faire un bon match et je me dis que si ça se trouve je n’y serai pas, parce que quand je tape des coups de pieds que que j’en loupe deux, je me dis « si celle là je la loupe à tel moment, ça peut être lourd de conséquences »...On y pense : c’est une motivation, c’est parfois un frein parce que ça met des ondes négatives. C’est en tout cas une super locomotive pour bosser, pour soulever un peu plus de poids, faire un peu plus de tapis...

Avant, vous étiez deux demi de mêlées pour une place, Yachvili et vous. Maintenant, il y a aussi Mignoni. Ca vous inquiète ? Je crois qu’il y a pire ! Il y a les troisièmes lignes qui sont douze pour six places (Rires), les talonneurs, les ailiers... Franchement, je le vis sans souhaiter de mal aux autres, comme on l’a fait avec Dimitri depuis deux ans, à se passer le flambeau régulièrement. Pierre, il était déjà présent dans le groupe, mais jamais dans une bonne dynamique, toujours dans des coups foireux, des matches pièges... Là il est enfin dans une bonne dynamique, et je suis très content pour lui parce qu’on s’entend très bien, on a joué souvent ensemble dans les sélections de jeunes.

Vous vous imaginez manquer le mondial ? Oui, et depuis bien longtemps. Bien avant ce tournoi, parce que cela fait partie du sport. Il peut y avoir une part de malchance, tu peux te fracturer une jambe, tu peux avoir un problème personnel...

Vous ressentez plus de pression maintenant ? Oui, ou peut-être moins, parce que maintenant les dés sont jetés, et Inch’Allah. Il faut tout donner à cent pour cent, et il est temps que ma saison commence parce que j’ai eu pas mal de pépins physiques. Il n’y a plus de calculs à faire, ce qui arrivera arrivera et je ne veux pas trop me prendre la tête, ce serait un frein aux performances. Après la vie de club et les résultats seront aussi très importants. Si Clermont est champion, Mignoni sera sûrement dans une bonne dynamique, et il sera peut-être numéro 1. Il y a tellement de paramètres qui rentrent en jeu qu’il est un peu prématuré de parler de tout ça. C’est comme un examen : tu te prépares pour l’avoir, mais il faut aussi te demander ce que tu fais si tu ne l’as pas. La Coupe du monde c’est pareil, ça peut ne pas sourire, à cause de contre-performances, de blessures... »


Propos recueillis par Aymeric MARCHAL, à Marcoussis (l’équipe.fr)


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