Laurent Rodriguez

Troisiéme Ligne Centre (Numéro 8)
mercredi 25 mars 2009
par  Stango
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Laurent Rodriguez, ancien entraîneur de Biarritz (champion de France en 2002) et de Brive, fort de 56 sélections en équipe de France et vice -hampion du monde en 87, détaille tout ce qui fait la supériorité des troisièmes-lignes centres.

« Nous faisions l’essuie-glace »

« Bien évidemment à l’image de la discipline, le poste de troisième-ligne centre a connu une évolution mais sans doute pas une révolution. A mon époque, le poste qui m’était dévolu nécessitait d’avoir un gros cour car nous faisions l’essuie-glace dans les phases de défense. Il était important de consolider le deuxième rideau défensif sur les phases de conquête adverses. Tantôt à droite, tantôt à gauche. On ne comptait pas les kilomètres. En même temps, il fallait être rigoureux dans son replacement et soutenir ses avants sur les phases de conquête. On jouait aussi plus près de la mêlée qu’aujourd’hui. On profitait du moindre espace pour attaquer au raz et il n’était pas rare que l’on tente une échappée autour de la mêlée. Ce qui n’a pas changé, en revanche, c’est l’importance sur le plan défensif. Plaquer à tour de bras est essentiel, comme à notre époque. Dans ce domaine, Serge Betsen est le parfait exemple du troisième-ligne, d’abord défenseur. Autre changement notable à mes yeux, l’influence en touche. Les troisièmes-lignes, de mon époque n’étaient pas forcément de grands sauteurs. Il y avait des joueurs dédiés à cela. Sans doute aussi parce que la morphologie et la préparation des joueurs est différente. Nous étions plus "massifs" et donc plus perforants sur les phases de conquête ou les regroupements. Je pense que physiquement, les 8 étaient plus forts plus performants dans l’impact. »

« Ce qui a changé »

« Le jeu a évolué, les tactiques ont évolué. Et donc les postes ont eux aussi connu des changements, parce que d’abord, à mon avis, les morphologies ont changé. Dans les années 90, il était finalement assez rare de trouver un 8 qui culminait à plus d’1,90m. C’est aujourd’hui monnaie courante, presque obligatoire, suis-je tenté d’ajouter. A cela plusieurs raisons. Le 8 doit évidemment être fort physiquement. Mais cette puissance ne doit surtout pas être un frein à sa vivacité. Au contraire. Il doit courir vite pour aller défendre, il doit aussi être un pourvoyeur de ballons. Il faut être complet : pour fournir des ballons, il faut d’abord être costaud sur ses appuis pour rester debout. Ensuite, il faut gratter les ballons. Et avant tout cela, il faut être un bon plaqueur. Toutes les équipes sont plus athlétiques dans toutes les lignes. Aussi, les capacités des 8 doivent être encore plus importantes, car si l’on ne fait plus l’essuie-glace, le repli défensif est une exigence dans le jeu d’aujourd’hui. Pour moi, les meilleurs exemples sont sans doute Lièvremont ou Bonnaire, qui ont ce sens tactique du replacement pour stopper très vite les perforations adverses. On court peut-être moins.encore que. Mais on touche plus de ballons, alors techniquement il faut être au point. Ce qui est sûr, c’est qu’un 8 aujourd’hui est aussi un sauteur. En touche, les troisièmes-lignes ont un rôle capital, ce qui n’était pas forcément le cas à mon époque. Les gars sont plus élancés, je dirais. Et puis les tâches défensives priment. Regardez bien sur les mêlées. Un 8 ne part jamais seul si le 9 ne le protège pas. L’exemple le plus criant est sans doute celui de Pichot, qui s’est régalé face à la France en ouverture du Mondial. Il n’avait qu’un objectif, empêcher Harinordoquy de jouer et Imanol n’a pu donner sa pleine mesure. A mes yeux, le poste de numéro 8 est devenu essentiel, presque un poste clé pour les entraîneurs. »

« Celui qui m’impressionne »

« Regardez dans ce Mondial, toutes les grandes équipes ont un très bon numéro 8. L’exemple le plus criant est sans doute le Néo-Zélandais McCaw. Lui n’est peut-être pas très grand, mais il possède la panoplie complète du troisième-ligne. Techniquement et tactiquement, il est très fort. Il plaque remarquablement, sait gagner les ballons et relancer le jeu. D’ailleurs, aujourd’hui, un 8 doit savoir aussi faire une passe tout en étant plaqué. Passer les bras, c’est aussi essentiel pour un troisième-ligne que pour un trois-quarts, désormais. Et puis, si vous savez jouer au pied, c’est encore mieux. Tout cela fait partie du registre du troisième-ligne moderne. McCaw a toutes ces qualités, l’agressivité en plus et un mental en acier. Côté français, je pensais que Harinordoquy allait s’imposer. Et puis Bonnaire a également fait montre de ses capacités d’adaptation à ce poste avec des qualités de sauteur exceptionnelles. »


Par Christian PASQUET (L’équipe.fr)


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